13 mai 2007

DRM: Mauvais pour les artistes


Il y a quelque temps, j'ai écrit un billet à propos des DRMs («Digital Rights Management»). J'ai essayé de montrer que du point de vue du consommateur, ils n'étaient pas une bonne chose. Cette fois, je vais tenter de démontrer qu'ils ne sont pas non plus une bonne chose pour les artistes.


Les DRMs ne sont pas une bonne chose pour les artistes car ils ne fonctionnent pas, ils n'empêchent pas la copie. Toutes les implémentations ont été contournées. Même les dernières en date (Vista et HD-DVD et Blue-Ray) sont en train de céder. Les DRMs gênent le consommateur moyen (laissant au passage le souvenir d'une mauvaise expérience), et incitent le consommateur frustré, motivé et inventif à mettre un contenu sans protection à disposition du monde. Quant aux industriels, ils semblent privilégier une propriété émergente des DRMs: enfermer les consommateurs dans leurs produits. Dans l'ensemble, les DRMs tendent à limiter l'expérience des consommateurs.


Il y a une foule d'intermédiaires entre l'artiste et le fan/consommateur. Les fournisseurs d'équipements du paragraphe précédent permettent de jouir de la production d'un artiste (baladeurs, lecteurs DVD, lecteurs de e-books, ...). D'autres se sont réservés la capacité de faire les copies du contenu à distribuer (maison de disques, éditeur de DVDs, maison d'édition, ...). Dans un monde digital où faire des copies est au coeur de toute activité, les DRMs permettent à ces intermédiaires de subsister. Mais pourquoi défendent-ils leur capacité obsolète de faiseurs de copies si farouchement? Tout simplement parce qu'il ne leur reste plus d'autres rôles.


Historiquement, ils se sont présentés comme filtres entre les artistes et nous les consommateurs. Ils nous proposent les meilleurs artistes qu'ils ont pu découvrir pour nous simplifier le choix. Aujourd'hui on peut mettre en doute leur soucis de qualité. Il a largement été remplacé par celui de la profitabilité: les faiseurs de copies n'embarquent que les artistes qui pourront rapporter de l'argent, quel que soit le niveau de niaiserie (je vous renvoie aux «tubes de l'été» et aux «stars» fabriquées à la télévision). C'est une approche qui censure la liberté d'expression des artistes et qui entache la liberté de choix des consommateurs.


Le deuxième rôle qu'ils ont toujours assumé est celui de promoteur. Le problème est qu'aujourd'hui les budgets de promotions sont concentrés sur quelques artistes (les gros, ceux qui se vendent bien et qui paradoxalement en auraient le moins besoin) et sont négligeables pour tous les autres. C'est vrai pour la musique, mais aussi pour les livres et les DVDs. Les artistes négligés se sont alors tournés vers d'autres canaux de promotion apparus avec internet: les blogs, les sites communautaires (MySpace, FaceBook et autres), les podcasts, les vidcasts, et ça fonctionne. L'énorme avantage de ces approches est la création d'un contact direct entre l'artiste et les fans. Dans ce domaine, les faiseurs de copies sont complètement dépassés.


La troisième casquette qu'ils assumaient concerne la protection des artistes. Encore aujourd'hui ils mettent en avant les DRMs comme le moyen de protéger les droits des artistes. Comme je l'ai déjà dit plus haut, les DRMs n'empêchent pas la copie mais légitiment le rôle de faiseur de copies. De plus, quand on voit comment certaines maisons de disques traitent leurs artistes, on peut se poser des questions quant aux intérêts qu'ils protègent: ceux des artistes ou les leurs? N'oublions pas que leur objectif est de gagner de l'argent, le plus possible, le plus vite possible. La protection des artistes n'est pas une priorité.


Tout artiste essaie d'établir une relation avec le public. C'est un long travail essentiellement basé sur le ressenti et les émotions. Par conséquent c'est une relation fragile. Est-ce l'intérêt d'un artiste d'être associé aux frustrations et aux déceptions provoquées par les DRMs? Est-ce une bonne chose pour un chanteur de rester dans le souvenir des fans comme celui qui les force à acheter plusieurs fois la même musique (une fois pour l'iPod, une fois pour le téléphone, une autre fois pour le dernier baladeur)? Est-ce cool pour un film de rester dans les mémoires comme celui qui aura désactivé le dispendieux lecteur HD-DVD de la famille? Est-ce laisser une bonne impression chez le spectateur lorsqu'il est fouillé à l'entrée du cinéma comme un délinquant pour rechercher une caméra? Je n'en suis pas convaincu.


Les DRMs n'ont aucune chance d'améliorer le contact entre artistes et fans. Par conséquent, ils sont une mauvaise chose pour les artistes. Il est temps de rechercher d'autres façons d'entretenir cette relation avec les moyens de communication actuels. Les artistes ont aujourd'hui la possibilité d'entrer en contact avec le monde entier et de diffuser leur contenu sans intermédiaires. Ils peuvent même inventer de nouvelles approches commerciales comme demander aux fans d'acheter un disque d'avance et d'utiliser l'argent pour produire le disque, une forme moderne du mécénat. Un nouveau monde est à inventer pour les artistes, au boulot!

1 commentaire:

eurockeennes a dit…

Acheter (et payer) en direct les artistes, voilà qui est mieux que les DRM

http://www.dailymotion.com/video/x1z30i_parodie-de-la-pub-citroen-virgin-me