26 avr. 2007

Les Podcasts


Depuis quelques mois, je consomme beaucoup moins de télévision. D'abord parce que je n'y trouve plus grand-chose d'intéressant, ensuite parce que les télévisions sont devenues trop avilissantes. Puisque leur objectif est de faire de l'audience, elles recherchent le plus petit dénominateur commun à tous les téléspectateurs et par conséquent nivelle le contenu par le bas. Quoi qu'il en soit, la télé ne me manque pas car j'ai trouvé un autre divertissement: les podcasts.


Le podcast résulte de la combinaison du blog, des fichiers mp3 et des flux RSS. Le blog est un site internet dans lequel l'auteur dépose, quand il le souhaite, des messages sur des sujets divers et variés. Un flux RSS permet d'être tenu au courant des ajouts à un blog sans aller le consulter. Il suffit de s'abonner à un flux avec un agrégateur pour qu'il vous prévienne dès qu'il y a du nouveau. Un podcast est un blog dans lequel les messages sont des fichiers audio. L'agrégateur de podcast (ou «podcatcher») télécharge les fichiers audio lorsqu'ils sont disponibles, il ne reste qu'à les écouter.


La forme audio offre deux avantages. D'abord, un son ne monopolise qu'un seul sens. Les autres sont libres, ce qui nous permet d'entreprendre d'autres activités pendant l'écoute d'un contenu (conduire, courire, voler, lire, écrire, marcher, etc). L'autre avantage concerne la fiction. Ecouter une histoire (tout comme la lire) sollicite plus l'imagination que lorsqu'on voit la même histoire défiler dans un film. Etant un lecteur assidu, j'attache beaucoup d'importance à l'imagination. J'ai toujours été déçu par les adaptations de romans, je préfère le film que je me fais dans la tête, plus profond, sans limite de budget et de temps.


A la différence des programmes radio classiques, le podcast est asynchrone. Vous n'avez pas besoin d'être disponible au moment de la diffusion pour en profiter. Votre podcatcher se charge de rapatrier les fichiers audio dès leur apparition, vous décidez quand et comment vous les écoutez. Cette liberté de jouissance est rafraîchissante dans le contexte audiovisuel actuel. J'ai repris le contrôle de mes loisirs, je ne suis plus l'esclave d'une programmation arbitraire.


L'intérêt principal des blogs réside dans l'interactivité. Poster un commentaire dans un bulletin ne prend qu'un click. Les podcasts ne renient pas leur origine: ils sont tout aussi interactifs. Ils est fascinant de voir l'effet d'un commentaire sur les épisodes successifs. Mieux, certains podcasteurs font appel aux auditeurs avant un épisode et sollicite du contenu ou des avis pour les intégrer dans l'épisode. Peut-on être plus interactif?


Tout le monde peut faire un podcast. Par conséquent, la diversité de contenu est impressionnante. On trouve de tout: du médiocre à l'excellent. Cette large palette ne facilite pas la recherche. Il faut se montrer patient, essayer quelques épisodes, laisser du temps à chaque podcast, mais ne pas hésiter à se désabonner et aller voir ailleurs si ça n'accroche pas. Ce qui est formidable, c'est la possibilité de trouver ce qui ne se fait nulle part ailleurs: des podcast dédiés à la bière, à l'écriture, la science fiction, la technique de podcast, etc; la liste n'est pas exhaustive (beaucoup en anglais mais il en existe aussi en français).


Pour moi, la plus belle utilisation du podcast concerne la fiction. On trouve pas mal de podcasts qui «publient» des histoires au format audio. Des auteurs qui n'ont pas réussi à se faire publier par une maison d'édition lancent leur podcast. Ils y lisent leurs livres chapitre par chapitre pour attirer l'attention. Certains ont plus de talent que d'autres mais si on aime écouter des histoires (comme les feuilletons radio des années 50 et 60), il y a pléthore de sources. Il existe un site qui offre un tremplin à tous ces auteurs, PodioBooks.com. Vous y trouverez un catalogue impressionnant de livres audio. Ai-je précisé que c'était gratuit? Toutefois, si une histoire vous plaît, faites un don, les 3/4 seront versés à l'auteur. Je trouve l'idée géniale.


Les podcasts ont tellement de succès qu'ils ont donné des idées aux vidéastes. Les Vidcast font leur apparition. J'en ai trouvé un très impressionnant: Strangerthings.tv. Ils publient une fiction de 30 minutes tous les mois, d'une qualité irréprochable. Il ne fait aucun doute que de tels contenus vont continuer d'apparaître, mais je continuerai de préférer les podcasts.


Vous commencez à comprendre pourquoi je ne regarde plus la télé? Je suis abonné à 25 ou 30 podcasts et une demi-douzaine de vidcasts. J'ai des heures de contenu à écouter chaque semaine; plus de temps pour la télé...

21 avr. 2007

DRM: mauvais pour les consommateurs


Le progrès est fait de révolutions: la pierre taillée, l'agriculture, les machines à vapeur, et dernièrement le numérique. Tout devient numérique: photo, film, TV, etc. Cette transition ouvre des portes au consommateur (plus de contrôle, de souplesse, de convivialité), mais comme toute médaille le numérique a son revers. J'en aborderai un aspect avec les DRMs, qui sont mauvais pour le consommateur.


Le terme «Digital Rights Management» (DRM) recouvre un ensemble de moyens techniques attachés à des biens de consommation numériques (musiques et films essentiellement). Leur rôle est de tenter de supprimer le piratage et préserver les droits d'auteur dans le monde numérique. La volonté est louable car sans rémunération correcte, les auteurs n'ont plus aucune incitation à créer. Malheureusement, la protection des auteurs a été rapidement détournée à d'autres fins.


Les moyens techniques déployés dans les DRMs n'ont qu'un seul objectif: vous surveiller et vous empêcher de faire ce que le propriétaire des droits du contenu numérique juge contraire à son intérêt. Comme il ne veut prendre aucun risque, il a une vision très restrictive de vos droits. Il vous interdit donc ce que vous avez toujours fait: une copie de sauvegarde, un transcodage dans d'autres formats (en braille par exemple), un prêt, une revente, l'enregistrement d'un programme de télé, etc. A tel point que DRM pourrait être l'acronyme de «Digital Restriction Management».


C'est à ce niveau que l'on voit le premier effet pervers des DRMs. On a vendu le numérique aux consommateurs en leur promettant d'obtenir davantage qu'avec les produits classiques. Or c'est exactement l'inverse qui se produit, ils obtiennent moins. Par conséquent, ils mettent en place des stratégies de contournement. Puisque les produits piratés n'ont pas les restrictions des «originaux», c'est vers eux qu'ils se tournent. Pas parce qu'ils cherchent à nuire aux artistes, mais parce que c'est le seul moyen qu'ils ont de jouir normalement de leurs achats numériques. Les DRMs poussent au piratage.


Ils ont un autre effet négatif sur le consommateur: ils l'enferment dans une marque. Sous le prétexte fallacieux de rendre la vie difficile aux pirates, les moyens de protection sont tenus secrets. Par conséquent, chaque constructeur développe ses propres DRMs, tous incompatibles. Acheter un bien numérique, c'est choisir une route qu'il ne sera plus question de quitter sous peine de faire une croix sur vos achats (la musique achetée sur iTune Store ne fonctionne pas avec Zune; il vous faudra tout racheter une deuxième fois si vous passez chez Microsoft). Il me semble que c'est un moyen efficace de limiter le choix du consommateur, non?


Ce qui est désespérant, c'est que le principe des DRMs n'a aucune chance de fonctionner. D'abord parce qu'il est très difficile de donner à quelqu'un une boîte qui contient quelque chose en espérant pouvoir contrôler à distance ce qu'il advient du contenu (contenu auquel la personne a légitimement accès). Ensuite parce que le numérique n'est bon qu'à une chose: copier des bits. C'est ce qu'il fait de mieux en mieux et de plus en plus vite. Espérer contrer cette tendance paraît illusoire. Les DRMs essaient de forcer une rivière à remonter la pente. Comme ils n'y parviennent qu'incomplètement, on a légiféré pour en interdire le contournement. En France, c'est la loi DADVSI.


Les constructeurs se servent également des DRMs pour limiter l'innovation. Aucun autre constructeur ne peut produire un meilleur lecteurs mp3 qu'Apple capable de jouer la musique de iTunes, on doit se contenter de l'iPod. Cela va même jusqu'à prévenir la sortie d'appareils qui rendraient pourtant bien service au consommateur. Un juke-box vidéo qui stockerait nos DVDs sur disque dur et qui mettrait toute notre vidéothèque à portée de télécommande, par exemple. Il ne verra jamais le jour car contourner les protections des DVDs est illégal.


Les DRMs ne sont pas qu'appliquées dans la musique et les DVDs. En fait, les mesures de protections sont partout: dans les eBooks, dans les PDFs, dans les HD-DVD et blue ray, dans les canaux de diffusion de télévision (y compris TNT) et surtout derrière tout ce qui est estampillé HD. Sous prétexte d'une meilleure qualité d'image, l'industrie fait entrer dans nos salons des appareils qui vont limiter notre usage de la télévision (fini l'enregistrement des programmes si le diffuseur ne le veut pas). Est-ce que le gain de qualité en vaut la peine?


Les DRMs sont une mauvaise chose pour les consommateurs. L'industrie du divertissement essaie de nous convaincre que leur introduction est nécessaire. Elle l'est pour l'industrie, pas pour nous. Elle lui est indispensable pour soutenir son modèle économique basé sur le contrôle de la copie. Elle gagne de l'argent en faisant des copies. Si tout le monde peut en faire, sa source de revenu disparaît. Pourquoi ne met-elle pas au point un autre modèle économique comme elle a forcé les musiciens à le faire avec l'apparition des enregistrements? Un modèle dans lequel plus un contenu est copié par le consommateur, plus il rapporte de l'argent. Surtout que ce modèle existe déjà...

14 avr. 2007

Transparence Globale


Il y a quelques jours, je suis tombé sur un livre intéressant. Il traite de la Transparence Globale, de ses effets significatifs sur la gouvernance des pays et sur les relations qu'ils entretiennent. L'auteure attire notre attention sur le fait qu'il y a des effets positifs à la Transparence Globale (encensés par les gouvernements), mais qu'il y a également des effets négatifs beaucoup moins populaires mais néanmoins dangereux. Pour sa démonstration, elle adopte un point de vue large en restant au niveau des états. Je me suis alors demandé quels effets la Transparence Globale avait sur nous, les citoyens-consommateurs.


La Transparence Globale résulte de la large diffusion d'informations dans les démocraties. L'information circule parce que les gouvernements communiquent avec leur peuple, parce que les partis politiques cherchent à obtenir le pouvoir et parce que les pays ont entérinés des traités internationaux qui requièrent la divulgation d'informations les concernant. De plus, la présence de médias forts en renforce la propagation et les technologies actuelles de l'information invitent chaque citoyen à s'exprimer et à donner son avis. Il en résulte une grande quantité de renseignements qui brosse un portrait fidèle de chaque pays.


Les effets de cette Transparence sont à la fois bons et mauvais. Du côté positif, l'information permet aux peuples de conserver la mainmise sur les gouvernants et renforce l'enracinement de la démocratie. Du côté négatif, l'information disponible tend à réduire et sursimplifier les faits dans un soucis d'accessibilité. Les nuances disparaissent et il est par conséquent toujours possible d'y trouver des arguments qui renforcent des idées reçues (assimiler tous les musulmans à des terroristes, par exemple).


Toutes ces considérations sont d'ordre général. A notre niveau de citoyen-consommateur, quels sont les effets concrets? D'abord, notre côté citoyen bénéficie pleinement de la transparence (cette dernière n'étant que l'extension du jeu démocratique au fil des années). Mais tout n'est pas rose pour autant. Il nous faut être vigilants et veiller à amplifier les aspects positifs de la transparence tout en cherchant à éliminer les aspects négatifs (les opinions à l'emporte-pièce sont encore trop nombreuses et stigmatiser des groupes sociaux reste un moyen commode de détourner l'attention).


Quant au consommateur qui cohabite avec le citoyen, il est dans une situation bien moins favorable. La raison en est simple: la Transparence Globale n'existe pas pour lui.


Le consommateur n'est qu'un intervenant de la machine économique. On y compte aussi les entreprises qui fournissent les biens de consommation. Or, si on sait que la transparence prospère dans un écosystème de démocraties, on peut se demander comment circule l'information dans un écosystème de dictatures? En effet, une entreprise n'est autre qu'une dictature à petite échelle. Un employé n'est pas un citoyen de l'entreprise, son rôle est de faire fructifier les intérêts de l'entreprise. Dans de telles conditions, il ne peut pas être une source d'information à l'instar du citoyen.


De son côté une entreprise n'émet que très peu d'information vers l'extérieur. En fait, rien ne l'y oblige (si ce n'est certains indicateurs économiques). L'équivalent des traités internationaux entre démocraties n'existe pas entre entreprises. Il en résulte une culture du secret qui est justifiée par la préservation des avantages concurrentiels: une entreprise en dit le moins possible pour éviter de se faire subtiliser ses idées. Incidemment, c'est aussi un moyen pratique de dissimuler ce qui est embarrassant (sécurité, risques, déontologie économique).


L'information qui sort effectivement des entreprises, la publicité, tient plus lieu de propagande que d'information. Elle n'offre que peu de contenu objectif au profit d'un effort de présentation qui tient lieu de miroir aux alouettes ou de technique de prestidigitation.


Les associations de consommateurs essaient de jouer vis-à-vis des entreprises le même rôle que les Organisations Non Gouvernementale qui aiguillonnent les gouvernements. Malheureusement, leur efficacité est nettement moindre. D'abord parce que l'information est difficile à trouver, ensuite parce que leurs moyens ne les autorisent qu'à un accès restreint aux médias. Le rapport de force en ce domaine est largement déséquilibré.


Il y a toutefois un espoir dans ce sombre tableau: nous bénéficions d'une technologie de l'information très efficace. Elle devrait nous permettre, à nous les consommateurs, de construire nos propres canaux médiatiques pour diffuser le plus d'information possible à propos des entreprises et de leurs produits. A nous de jouer les ONGs de la consommation. Nous avons pour nous le nombre: il y a plus de consommateurs que d'entreprises. A nous de les forcer à intégrer nos critères dans leur communication. Certains apparaissent déjà sous forme de label (commerce équitable, développement durable, etc.) Nous avons les moyen de rétablir l'équilibre, il faut nous y mettre et reprendre la parole.

6 avr. 2007

Chauffer de l'eau peut paraître simple, rien de plus faux...

Je ne cesserai jamais de m'émerveiller devant les surprises que nous réservent les lois de la physique et de la chimie. On croit avoir compris un phénomène pendant des années jusqu'au jour où la nature nous dévoile une nouvelle facette et remet en cause nos connaissances. C'est ce qui m'est arrivé ce matin au boulot en préparant mon thé.


Je ne bois pas de café car je n'aime pas le goût. A la place, je prends du thé. D'un point de vue social, les rôles respectifs du café et du thé sont très similaires. C'est par ce biais que je participe à la réunion informelle du café matinal sans pour autant me ruiner la santé. Nous avons investi dans une bouilloire pour chauffer de l'eau et je fais infuser mon thé préféré chaque matin. Aujourd'hui comme tous les jours, je m'apprêtais à chauffer l'eau mais impossible de mettre la main sur la bouilloire. Jusqu'à ce que je me rappelle qu'elle était chez moi, je l'y avais oubliée.


Deux questions se posent en lisant ce qui précède: pourquoi est-ce que la bouilloire du travail était chez moi et comment ai-je fait pour oublier ça? Je vais commencer par éclaircir le deuxième point: c'était un lundi matin. Vous connaissez beaucoup de gens qui sont efficaces en arrivant au travail le matin? Le lundi en particulier? Quant au premier point, il tient au fait que notre eau est très calcaire. Après deux semaines, le dépôt dans la bouilloire allonge significativement le temps d'ébullition. Je prends donc sur moi d'emmener la bouilloire chez moi le week-end pour éliminer le tartre, ce que j'ai fait cette semaine.


Heureusement nous avons de la ressource. Outre la fameuse bouilloire, le bureau compte un four à micro-ondes que personne n'utilise. C'est un four quelconque et bon marché mais suffisant pour chauffer un peu d'eau. J'ai donc rempli mon mug d'eau froide, l'ai placé dans le four bien au centre du plateau, fermé la porte, réglé la puissance au maximum et lancé un cycle de 3 minutes. Je dois dire qu'à ce moment précis j'étais assez fier de moi. Je venais de faire montre d'une capacité d'adaptation extraordinaire de si bon matin. C'est le ding de la fin du cycle de chauffage qui m'a sorti de ma béatitude matinale.


J'avais donc un mug d'eau fumante devant moi. La suite des opération consiste à faire infuser des feuilles de thé emprisonnées dans une cuillère à thé pendant quelques minutes. Il suffit ensuite de retirer la cuillère et le thé est prêt. Le seul inconvénient de cette technique est qu'il reste des petits débris de feuilles qui se sont échappés par les trous de la cuillère. Heureusement, ils coulent rapidement au fond du mug et ne gênent en rien la dégustation. C'est en essayant d'appliquer cette recette ce matin que les lois de la nature m'ont pris au dépourvu.


D'abord, je n'avais jamais vu du thé mousser en infusant. Pour créer des bulles dans de l'eau il faut beaucoup agiter. Ici aucun mouvement, mon thé s'est mis à mousser tout seul! J'ai utilisé le même thé, la même cuillère, le même mug et la même eau que d'habitude. Seul le chauffage de l'eau était différent. Etait-ce suffisant pour provoquer l'apparition de mousse?


Ce n'est pas tout. De petits débris de thé se sont échappés de la cuillère comme les autres jours, rien de plus normal. Sauf qu'au lieu de s'accumuler au fond du mug, ils se sont mis à flotter à la surface! Je ne vous raconte pas les contorsions labiales nécessaires pour boire du thé en évitant les petits morceaux de feuilles qui flottent. Une paille m'aurait bien été utile.


Et pour couronner le tout, le goût était complètement différent.


J'ai cherché une explication en vain. La seule différence entre le thé de ce matin et celui des autre jour résidait dans la façon de chauffer l'eau. Je n'arrive pas à croire que le chauffage au micro-onde puisse corrompre de l'eau à ce point. Après tout, on ne fait que provoquer l'agitation des molécules d'eau dans les deux cas. Est-ce suffisant pour changer les propriétés de l'eau?


Et puis je me suis rappelé qu'un des principes de la science est d'accepter de ne pas tout savoir et rester humble devant la nature et ses mystères. Il me suffira de ne plus oublier la bouilloire.